Lors de la 3e édition de la Bassphase en novembre dernier, nous avons rencontré Hyperforms. Le DJ et producteur finlandais s’exprime sur ses multiples influences, l’évolution continue de son projet et le développement actuel du mouvement wave.
Interview avec Hyperforms
Comment te décrirais-tu en tant qu’artiste ?
Mon trajet dans la musique a commencé depuis assez longtemps. Avant que je ne débute le projet Hyperforms, j’étais principalement beatmaker. Je produisais des instrus hip-hop pour des artistes – je le fais encore, d’ailleurs. J’ai toujours eu la fibre de la musique électronique en moi. Je me suis progressivement mis à en produire, de plus en plus. Je n’avais pas vraiment l’intention de lancer une carrière en solo. C’est arrivé presque par accident. Car les premiers sons que j’ai publié pour me faire connaître étaient ceux en tant que beatmaker.
C’est un peu comme ça que le projet Hyperforms est né. Progressivement, ma signature sonore a commencé à évoluer. J’ai reçu de plus en plus de soutien sur SoundCloud – cela m’a motivé à continuer. J’ai réalisé qu’avec la musique électronique, j’avais beaucoup plus de moyens de m’exprimer musicalement qu’en tant que beatmaker, ce qui m’a conduit sur le chemin que j’ai emprunté ces dernières années. Bien qu’il soit agréable de produire pour d’autres artistes de temps en temps, j’apprécie vraiment la liberté créative d’être un artiste à part entière et de pouvoir faire exactement le type de musique qui correspond à ma vision.
Quels artistes t’ont fait découvrir la wave et t’ont donné envie d’en produire ?
J’ai presque l’impression que ce n’était pas une décision consciente de commencer à produire de la wave. Car à l’époque où je l’ai découverte, il n’y avait même pas vraiment de nom donné à ce genre. J’ai découvert beaucoup de producteurs avec un son assez similaire, et j’ai appris plus tard qu’on appelait cela de la wave. Je pense que j’ai toujours été attiré par la musique plus mélodique, et l’atmosphère de la wave a résonné en moi comme aucun autre genre électronique ne l’avait fait auparavant. Des producteurs comme Clams Casino, Gud, xxyyxx, et d’autres artistes de la scène cloud rap ont eu une grande influence sur la naissance du genre. Leurs productions m’ont personnellement fortement inspiré pour apporter cet esprit à ma musique.
Tu aimes combiner beaucoup d’éléments musicaux et d’influences dans ta musique. De la hard trap, à la dubstep ou la drum and bass, en passant par des sonorités plus mélodiques…
En fait, je n’aime pas me considérer comme un artiste wave ou me catégoriser comme faisant partie d’un genre musical en particulier. Je prendrai le risque de me limiter en faisant cela. J’aime expérimenter de nombreux sons et styles différents. Je préfère combiner plusieurs styles musicaux et garder ma signature sonore dans le même temps.
Mais j’ai quand même l’impression que la wave a toujours fait énormément partie de mon univers. Pour moi, elle se reconnaît dans mon identité musicale.
Cela a également une réelle valeur ajoutée quand tu te produis devant des gens : tu peux créer plus facilement quelque chose de dynamique et diversifié…
Oui, je pense que c’est une bonne chose ! Évidemment, certaines personnes peuvent s’attendre à un certain type de set. Par exemple, que tu joues uniquement de la wave à un évènement wave. Mais je trouve qu’il faut justement aller à contre-courant de cela et essayer de proposer quelque chose de frais, de nouveau, changer d’ambiance. Pour moi, c’est bien plus amusant. Quoi qu’il en soit, la wave est un genre assez diversifié, et j’aime à penser que ses auditeurs sont ouverts à plus de variations.
Quelles sont tes plus grosses influences actuelles ?
Mes influences sont vraiment multiples, que ce soit en wave, trap, drum and bass, dubstep…. C’est très compliqué de citer un artiste ou un genre en particulier qui se démarque des autres, mais si je devais en citer quelques-uns, je dirais Porter Robinson, Gud, Clams Casino, Burial, Flume ou Noisia.
Tu as déclaré que ton morceau “Reign” était un mélange entre ton ancienne et ta nouvelle musique. Comment décrirais-tu cette évolution au fil des années ?
Je pense que ma musique a lentement dérivé vers quelque chose qui s’apparente plus à de la bass music. Quelque chose d’explosif, d’énergique. Je pense que quand j’ai commencé à faire de la musique, je n’avais pas l’intention de jouer mes morceaux devant des gens. C’est peut-être quelque chose qui a changé ma perspective sur comment j’écris mes morceaux.
C’est peut-être pour ça que mes morceaux sont devenus un peu plus “dancefloor-friendly” (sic).
Mon ancienne musique est assez lente, un peu typique du beatmaking. Elle a évolué en s’inspirant d’influences qui appartiennent au monde de l’EDM. Pour moi, c’est une question d’évolution constante plutôt qu’un tournant marqué dans le temps. C’est quelque chose qui s’est construit au fil des années et qui devait se passer comme ça. Comme je l’ai dit, je n’ai pas l’intention de rester à un point spécifique.
Tu es sur le point de jouer à la Bassphase, la seule soirée wave en Belgique. Tu as également joué à la dernière édition de la Rampage. Que penses-tu de l’évolution de la scène, en Europe et dans le monde ?
Je pense que la scène wave est assez intéressante. Parce que depuis longtemps, elle n’a pas vraiment de maison, de domicile. C’est un genre qui s’est développé principalement sur Internet. C’est fou de voir qu’autant d’événements ont lieu et que certaines villes ont leur propre scène. Il y a beaucoup de bons producteurs qui se développent.
La wave en tant que telle a aussi beaucoup évolué. Elle a pris une direction qui lui permet de convenir plus aux soirées, aux concerts, aux DJ sets. Je vois aussi beaucoup de genres se croiser, et de nouvelles influences apparaître. Cela rend selon moi la wave plus intéressante. Chaque année, elle se redéfinit. En fait, je dirais même que la wave devient de plus en plus compliquée à définir comme un genre. Dans le sens où tu peux avoir tellement de sentiments différents quand tu en écoutes.
Et en Finlande ? A quel point cela est-il compliqué d’acquérir une notoriété alors que la scène nationale n’est pas très développée ?
Je ne pense même pas qu’il y ait actuellement (en Finlande) ce qu’on peut appeler une scène. Il y a seulement quelques personnes qui produisent de la wave. Il n’y a eu qu’un seul événement wave en Finlande, c’était en 2019. De ce que je sais, c’est la seule soirée wave qu’il y a eu dans l’Histoire du pays.
Clairement, il n’y a pas en Finlande le même genre de soirées wave qu’en Pologne, en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis. En Finlande, la scène électronique est principalement techno et drum and bass. J’ai d’ailleurs pu jouer plusieurs sets drum and bass et “passer en douce” (sic) quelques sons wave dans mes sets. Jusqu’ici, les réponses ont été assez bonnes. Je pense que c’est juste une question de temps avant que les gens en découvrent plus sur la wave et commencent à s’intéresser au genre.
D’ailleurs, tu as sorti des sons sur Liquid Ritual (un label anglais) et tu as joué pour la BBC Bristol. A quel point la scène britannique peut-elle influencer le développement d’un genre ou de certains artistes ?
L’Angleterre est sans aucun doute l’un des endroits les plus importants pour la wave, car c’est là que les premiers mouvements de la scène ont eu lieu. Il y a beaucoup de grands producteurs et de labels importants qui viennent de là-bas. Je me sens reconnaissant de pouvoir collaborer avec des personnes de la scène britannique telles que Liquid Ritual. Selon moi, c’est l’un des labels les plus importants de la scène actuelle. Ils ont également organisé beaucoup d’événements au Royaume-Uni et en Europe, m’offrant la possibilité de prendre part à plusieurs d’entre eux.
Quel est l’événement dans lequel tu rêves d’un jour de te produire ?
C’est marrant, parce que je n’avais jamais pensé à me produire en concert avant que quelqu’un ne me programme. Donc, je n’ai jamais vraiment rêvé d’un grand festival dans lequel je pourrais jouer…Même je dirais bien sûr oui si on me proposait un jour de jouer à l’EDC !
Je pense qu’il est toujours plus important de jouer devant des gens qui sont vraiment intéressés par ta musique, même s’il n’y a que 20 personnes devant toi. J’ai eu la chance de faire des concerts en Europe devant de vrais passionnés de musique, donc je veux vraiment continuer à faire plus de concerts ici. Mais j’aimerais aussi aller aux Etats-Unis et en Asie un jour. J’espère que ça arrivera bientôt !
Dernière question : que signifie ton nom d’artiste ?
C’est un peu marrant. Parce que je ne me rappelle plus vraiment d’où je tire ce nom d’artiste. Mais il est resté avec le temps, et je peux désormais l’utiliser en quelque sorte pour décrire ma musique.
Au début, il n’avait pas vraiment de sens. Mais je pense qu’il correspond avec l’esthétique de ma musique. Hyperforms peut être pensé dans le sens où j’essaye de combiner plusieurs styles et que je me réinvente continuellement. C’est un peu la nature de mon projet. Mais je ne veux pas lui accorder trop de sens. Finalement, c’est juste un nom. Qui sonne quand même super bien !