Les fans de Dubstep de la première heure connaissent évidemment le Britannique Skream. Après bien des années sans sortir de morceau dans le genre qu’il a grandement contribué à évoluer. L’un des artistes les plus influents de sa génération est de retour avec “Summoned”.
Petite leçon d’histoire : qui est Skream ?
Skream, de son vrai nom Oliver Dene Jones, est un DJ/Producteur britannique originaire de Bromley, à Londres.
Très jeune déjà, Jones va être en contact avec un mouvement musical émergent en Grande-Bretagne et plus particulièrement dans la scène londonienne : la Dubstep. Ses premiers contacts avec le genre se déroulent lorsqu’il travaille dans le mythique (et regretté) magasin de disques Big Apple Records. Pour vous donner une idée de l’importance culturelle de ce label et son implantation énorme dans la scène rave locale de l’époque, on vous conseille cet excellent documentaire de la chaîne de référence GetDarker. Un retour de plus d’une dizaine d’années en arrière.
Ce qu’il faut savoir, c’est qu’à l’époque, la Dubstep est bien plus qu’un genre musical émergent. C’est un mouvement social. En opposition totale au monde moderne et la société britannique mainstream, une communauté underground se réunit pour danser toute la nuit aux rythmes de cette musique underground. Musique aux inspirations 2-step et inspirée des soundsystems jamaïcains. C’est aussi à cette époque que se développe un réseau de radios pirates, diffusant ses programmes parfois depuis les toits des immeubles.
C’est ainsi que, baignant dans cette culture et cet environnement musical en constante mutation, Skream commence à sortir ses premières productions avec l’un de ses amis, lui aussi élève de l’école Big Apple : Adegbenga Adejumo aka Benga. Ensemble, ils formeront d’ailleurs quelques années après le groupe Magnetic Man.
Skream va sortir progressivement plusieurs morceaux considérés maintenant encore comme des références dans l’histoire de la Dubstep. À savoir “28g” – avec Loefah – ou “Midnight Request Line”. 2006 sera assurément l’année de Skream. Avec les sorties de ses deux premiers EP “Skreamizm” et son premier album intitulé sobrement “Skream !” sur le légendaire label Tempa. Vous reconnaîtrez peut-être les si plaisants “Rutten”, “Dutch Flowerz” ou “Tapped” avec la légende Grime JME (le frère de Skepta, pour la petite histoire).
Aux côtés des Mala, Coki, Burial ou autres Hatcha, Skream devient donc l’un des plus grands artistes Dubstep dans une ville se délectant chaque week-end des programmations de salles mythiques. La Fabric, pour n’en citer qu’une.
Skream se détourne de la Dubstep
Mais la Dubstep s’exporte de mieux en mieux, de plus en plus. Des producteurs tels que Caspa et – surtout – Rusko l’expérimentent, lui donnent cet aspect moins sombre, moins axé “Dub”. Dans l’expérimentation, la Dubstep pure et dure devient “Tearout”, puis “Brostep”. Oui, c’est le début d’une époque que les fans de “vraie” dubstep vont haïr : celle des Skrillex, Flux Pavilion, Zomboy, Nero et compagnie. Le genre devient de plus en plus commercial. Il passe sur les radios publiques, ses représentants sont bookés sur les mainstages des plus grands festivals. Certains remportent même des Grammys.
Skream, qui a continué à produire mais qui ne se retrouve plus dans cette nouvelle ère du genre, décide de jeter l’éponge. En 2013, il déclare dans les colonnes du Daily Star que la Dubstep et lui, c’est fini.
« C’est le dernier concert dubstep que je jouerai jusqu’à nouvel ordre. La dubstep n’est plus qu’un nom. Il n’a plus de signification et le mouvement est terminé. Je fais de la dubstep depuis l’âge de 14 ans, mais il est hors de question que l’on me dicte ma conduite. J’ai décidé d’arrêter parce que cela ne m’inspire plus rien ».
Skream dans le daily star, le 28 mai 2013
Ainsi, il déclare également être influencé par les Daft Punk. Skream désire alors se consacrer désormais à la disco, la house ou la techno.
Skream : le retour progressif du Roi
Le monde de la dubstep, qui d’ailleurs évoluera totalement durant les années d’absence de l’un de ses pionniers, sèchera finalement ses larmes en 2019 lorsque Skream annonce sur les réseaux sociaux qu’il jouera à nouveau un set Dubstep. La toile s’enflamme. Quelques mois plus tard, il se produit en B2B avec Rusko sur la scène de l’immense festival EDC de Las Vegas.
Ainsi, Jones retourne progressivement à ses sources. Il recommence à jouer plusieurs sets Dubstep. Il sort sur Duploc le titre “139.6” Riddim avec Rusko et Scuba en 2020. Mais également la sortie de trois volumes de ses « Unreleased Classics », datant de son époque dorée – dès 2002.
L’année d’après, il surprend tout le monde en collaborant avec Must Die ! et Akeos. Un titre incroyable intitulé “LOL OK”, comme pour instaurer une lignée dans l’histoire du genre.
Début 2022, il balance une bombe en annonçant le retour de Magnetic Man avec son ami de toujours, Benga.
La boucle est bouclée, avec Summoned
Pour boucler la boucle, il ne manquait plus qu’une release en solo. C’est chose faite avec “Summoned”, sortie le mois dernier.
Dès les premières notes, on reconnaît cette volonté de revenir aux sources, avec cette influence Dub si reconnaissable. Comme si Jones voulait nous rappeler d’où vient la Dubstep, nous ramener là où tout a commencé pour elle.
Le style de Skream, toujours très hypnotique et britannique, n’a au final jamais vieilli. Comme s’il était intemporel. Mieux encore, il semble s’être enrichi des influences qu’il a reçues de la techno ces dernières années. Le retour qu’il nous fallait à tous.
Crédits d’image: Skream.